Micaëla HENICH Paysages déroulés

Exposition personnelle du 17 juin au 17 juillet 2010


Paysages déroulés

 

 Depuis toujours, j‘aime la Chine. 

 Enfant, j’accompagnais souvent ma mère
visiter un des lieux les plus mystérieux qui soient à Paris : le musée
Cernuschi.

J’y passais des après-midi entières,
fascinée, à détailler ces surprenants paysages déroulés, entre réel et
imaginaire, ces paysages de « montagne et d’eau », qui me
semblaient n’avoir pas de fin, à l’intérieur desquels je me perdais, comme me
semblaient perdus les minuscules humains représentés – paysans courbés sous le
poids de fardeaux divers, ou moines grimpant vers leurs monastères par d’étroits
sentiers escarpés, au flanc de montagnes vertigineuses, aux couleurs
improbables, allant du vert émeraude le plus violent aux tons sépia .

Perspectives chinoises si radicalement
opposées à celles de l’Occident, avec leurs angles de vue multiples et leurs
perspectives doubles, où celui qui regarde n’est plus spectateur, mais
partie intégrante du paysage.

 Lorsque je déroulai pour la première
fois l’un de ces rouleaux de papier à cigarettes que tous les fumeurs de joints
connaissent, je ne fis pas immédiatement le lien avec mes souvenirs d’enfance,
mais je pris aussitôt la plume et, comme en rêve, je commençai à dessiner, pour
ne m’arrêter que six mètres plus tard, à la fin du rouleau… Ensuite seulement
s’imposa la couleur, le crayon Caran d’Ache.

 Après avoir dévalisé en papier le tabac
du coin, je me lançai dans un travail d’écriture-peinture, qui devait durer
près d’une année, stoppé net faute de matériel : sur toute la longueur des
rouleaux – nouvelle édition – s’étalait à présent la marque du fabricant,
rendant le dessin impossible.

 Disparues la beauté de la texture, la
finesse du filigrane vergé, la transparence laiteuse, soyeuse du papier. Mais
peut-être aussi étais-je arrivée « au bout du rouleau ».

 L’exposition chez Jacques Elbaz montre
pour la première fois un travail achevé il y a une quinzaine d’années déjà –
une trentaine de rouleaux.

 Micaëla Henich



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